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Épicure à Hérodote, salut. Pour ceux, Hérodote, qui ne peuvent pas se consacrer à l'étude détaillée de ce que j'ai écrit sur la nature, ni examiner avec attention les ouvrages plus longs que j'ai composés, j'ai préparé un résumé de tout le système pour leur permettre de retenir d'une manière suffisante dans la mémoire les opinions les plus fondamentales, afin qu'en chaque occasion, dans les questions les plus importantes, ils puissent s'aider eux-mêmes, toutes les fois qu'ils toucheront à l'étude de la nature. Et ceux aussi qui ont avancé suffisamment dans l'examen des ouvrages complets, il faut qu'ils gardent en mémoire le schéma, réduit aux éléments, du système entier ; car nous avons un besoin fréquent de la saisie de l'ensemble, non autant de celle des parties. Il faut donc aller continuellement vers les vues d'ensemble, mettre dans la mémoires cela seulement à partir de quoi sera possible la vue dominante jetée sur les choses, en même temps que se fera jour la connaissance précise et complète du particulier, du moment qu'auront été bien compris et bien retenus les schémas valables universellement. Car, même dans le cas de celui qui est parfaitement instruit, c'est cela qui permet, dans toute connaissance précise, de dominer le détail : le fait de pouvoir user rapidement des vues rassemblantes, en ramenant chaque chose à des éléments et à des termes simples. Car la concentration de la vue englobante qui enserre toutes choses sans faille, ne peut appartenir à qui n'est pas capable d'embrasser en lui-même, à l'aide de formules, tout ce qui a été examiné avec précision dans sa particularité. C'est pourquoi, une telle méthode étant utile à tous ceux qui sont familiarisés avec la science de la nature, moi qui recommande une activité, assure à la vie la parfaite sérénité, j'ai fait, pour toi aussi, un tel résumé qui expose, dans leurs éléments, les doctrines complètes.
Il faut en premier lieu, Hérodote, avoir saisi ce qui est mis sous les sons, afin que, nous y référant, nous puissions juger des choses d'opinion, qu'elles soient objets de recherche ou de doute, et que toutes choses ne restent pas non jugées, pour nous les démontrant à l'infini, ou que nous n'ayons que des sons vides. Car il est nécessaire que, pour chaque son de voix, la notion primitive soit sous le regard et n'ait en rien besoin de démonstration, si toutefois nous devons avoir à quoi rapporter ce qui est objet de recherche ou de doute, c'est-à-dire d'opinion. De plus, il faut observer toutes choses d'après les sensations, et, de façon générale, d'après les appréhensions immédiates, soit de la pensée, soit de n'importe lequel des critère, de même encore d'après les affections présentes, afin que nous ayons de quoi procéder à partir de signes à des inférences au sujet de ce qui attend confirmation et de l'invisible.
Ayant saisi distinctement cela, il faut maintenant jeter un regard d'ensemble sur les choses invisibles. Tout d'abord rien ne naît du non-étant : car tout naîtrait de tout, n'ayant en rien besoin de semence. Et si ce qui disparait était réduit, par destruction, au non-étant, toutes choses auraient péri, ce en quoi elles se sont dissoutes n'étant pas. Et le tout a toujours été tel qu'il est maintenant et sera toujours tel. Car il n'est rien en quoi il puisse se changer ; et, en dehors du tout, il n'est rien qui, étant entré en lui, ferait le changement.
De plus : le tout est < corps et vide >. Car, que les corps soient, la sensation elle-même l'atteste en toute occasion la sensation, d'après laquelle il faut, par le raisonnement, se former un jugement sur l'invisible, comme je l'ai dit auparavant. Si < d'autre part > n'était pas ce que nous appelons vide, espace ou nature intangible, les corps n'auraient pas où être ni à travers quoi se mouvoir, comme nous voyons qu'ils se meuvent. En dehors de ces choses, on ne peut rien concevoir, ni sensiblement, ni par analogie au sensible, que l'on prenne comme des natures complètes, et non comme ce que l'on appelle accidents ou propriétés de ces natures.
Et de plus : parmi les corps, il y a les composés, et ceux dont les composés sont faits. Ceux-ci sont insécables (atoma) et immuables, si toutefois tout ne doit pas se résoudre dans le non-étant, mais que, dans la dissolution des composés, des choses résistantes restent, compactes quant à la nature, et n'ayant ni par où ni comment être décomposées. De sorte que, nécessairement, les principes insécables sont les natures des corps.
En outre : le tout est infini. Car ce qui est limité a une extrémité ; or l'extrémité est vue à côté de quelque chose d'autre. De sorte que, n'ayant pas d'extrémité, il n'a pas de limite ; mais n'ayant pas de limite, il ne saurait être qu'infini, et non limité. Et encore : le tout est infini par la quantité des corps et la grandeur du vide. Car, si le vide était infini et les corps finis en nombre, les corps ne resteraient nulle part, mais seraient emportés dispersés à travers le vide infini, n'en rencontrant pas pour leur servir d'appui et les renvoyer en les heurtant. Si le vide était fini, les corps infinis en nombre n'auraient pas où loger.
En plus de cela, ceux des corps qui sont insécables et pleins, desquels les composés sont formés, et en lesquels ils se résolvent, ont une variété de formes telle que le nombre ne peut en être embrassé par l'esprit. Car il n'est possible que tant de différences naissent des mêmes formes en nombre concevable. Et pour chacune des formes, les atomes semblables sont infinis en nombre, mais seulement inconcevable, si l'on ne veut pas, pour les grandeurs aussi, les faire aller absolument à l'infini.
Les atomes se meuvent continûment durant l'éternité, les uns s'écartant loin les uns des autres, les autres, au contraire, gardant là même leur vibration, quand ils se trouvent pris dans un enchevêtrement ou enveloppés par des atomes enchevêtrés. Car la nature du vide, qui sépare chaque atome en lui-même, produit cet effet, n'étant pas capable de leur fournir un appui ; et la solidité qui leur appartient, dans le choc, produit le rebond, dans la mesure où l'enchevêtrement permet, à la suite du choc, le retour à la position antérieure. Il n'y a pas de commencement à ces mouvements, les atomes étant causes, le vide aussi.
un tel exposé, toutes ces choses étant bien gardées en mémoire, offre un schéma suffisant de la doctrine au sujet de la nature de ce qui est.
Mais les mondes aussi sont en nombre infini, les uns semblables à celui-ci, les autres dissemblables. Car les atomes étant en nombre infini, comme cela vient d'être démontré, sont emportés même aux distance les plus grandes. Et d'autre part, de tels atomes, desquels pourrait naître un monde, ou dont il pourrait être constitué, ne s'épuisent ni en un seul, ni en un nombre fini de mondes, ni dans tous ceux qui sont tels que celui-ci, ni dans tous ceux qui diffèrent de ces derniers. Ainsi il n'est rien qui fasse obstacle à l'infinité des mondes.
En outre il y a des répliques, de même forme que les corps solides, mais qui, par leur finesse, sont loin au-delà de ce qui se manifeste aux sens. Il n'est pas impossible, en effet, que se produisent, dans le milieu environnant, des émanations de telle sorte, ni que se trouvent les conditions propres à la confection d'enveloppes creuses et fine, ni que les effluves conversent, dans leur succession, la position et la structure qu'ils avaient dans les corps solides. Ces répliques, nous les appelons simulacres.
De plus, leur mouvement à travers le vide, se produisant sans aucune rencontre de corps qu'elles heurteraient, accomplit tout parcours imaginable en un temps inconcevable. Car la résistance prend l'aspect de la lenteur et la non-résistance celui de la vitesse. Certes, ce n'est pas en même temps, si les temps sont perçus par la raison, qu'un corps en mouvement arrive en multiples lieux c'est chose inconcevable , et cela alors que, arrivant, dans le temps sensible, partout en même temps de n'importe où de l'infini, il ne sera pas détaché d'un lieu à partir duquel nous saisirons le mouvement. Car il y aura ressemblance avec la résistance, même si nous avons admis, jusqu'à ce point, que la vitesse du mouvement ne devrait pas rencontrer de résistance. Il est utile de retenir aussi ce principe.
 Ensuite, que les simulacres soient d'une finesse insurpassable, aucun des phénomènes n'y contredit : de là vient qu'ils ont aussi des vitesses insurpassables, tous trouvant un passage proportionné, outre le fait qu'à un nombre infini d'entre eux, rien ou peu de chose ne fait obstacle, mais que pour beaucoup et même pour une infinité, quelque chose aussitôt fait obstacle.
Outre cela, que la naissance des simulacres ait lieu en même temps que la pensée, < rien non plus ne l'infirme > . Car le flot qui s'écoule de la surface des corps est continu, il n'est pas rendu visible par la diminution < des corps > à cause du processus compensatoire ; il conserve pendant longtemps la position et l'ordre des atomes sur le corps solide, même s'il est vrai que parfois il se trouve, et que des assemblages se forment rapidement dans le milieu environnant ( puisqu'il n'est pas nécessaire qu'ils soient remplis en profondeur ) il y a, du reste, d'autres façons encore dont peuvent s'engendrer de telles natures. Rien de cela n'est en désaccord avec les sensations, si l'on considère de quelle manière il mettra en rapport avec nous les forces en action et les représentations sympathiques issues des objets extérieurs.
Il faut encore admettre que c'est parce que quelque chose venant des objets extérieurs pénètre en nous que nous voyons les formes et que nous pensons. Car les objets du dehors n'imprimeraient pas en nous leur nature propre de couleur et de forme par le moyen de l'air interposé entre eux et nous, ni par des rayons ou quelque flux que se soit allant de nous vers eux, comme ils le font au moyen de répliques venant des choses en nous, semblables à elles par la couleur et par la forme, pénétrant dans nos yeux ou dans notre esprit à la faveur de la taille appropriée, animées d'un mouvement très rapide, et, pour cette raison transmettant l'image d'un objet un et continu et conservant, loin du substrat, la sympathie avec lui, grâce à la pression proportionnée qu'elles en ont reçue du fait de la vibration en profondeur des atomes dans le corps solide. Et l'image que nous saisissons par une appréhension de la pensée ou par les sens, soit de la forme, soit de ses propriétés, est la forme même du solide, se constituant d'après l'ensemble compact et cohérent du simulacre, ou d'après ce qui en reste.
Mais le faux et l'erreur résident toujours dans ce qui est ajouté par l'opinion, qui doit être confirmé ou ne pas être infirmé, mais qui ensuite n'est pas confirmé < ou est infirmé > , cela en fonction d'un certain mouvement en nous-mêmes, lié à l'appréhension de l'image mais s'en écartant, écart par lequel le faux se produit. Car la ressemblance avec les objets dits réels et vrais des images saisies comme des reproductions, soit qu'elles apparaissent dans le sommeil, ou se produisent selon d'autre modes d'appréhension de la pensée ou les autres critères, n'existerait pas s'il n'y avait ces émanations-là, objet immédiat de notre appréhension. Mais l'erreur n'existerait pas si nous n'éprouvions, de plus, quelque autre mouvement en nous-mêmes, lié < à l'appréhension de l'image > , mais qui s'en écarte : en vertu de ce mouvement, s'il n'est pas confirmé, ou s'il est infirmé, se produit le faux, s'il est confirmé ou n'est pas infirmé, le vrai. Et cette thèse aussi, il faut la retenir fermement, afin que les critères fondés sur les évidences ne soient pas détruit, et que l'erreur, étant établie à l'égal de la vérité, ne trouble pas tout.
Autre chose : l'audition aussi provient d'un flux émanant de ce qui fait entendre une voix, un son, un bruit, ou produit de quelque manière une affection auditive. Ce flux se répand divisé en petites masses formées de parties semblables, qui maintiennent à la fois une certaine sympathie entre elles et une unité caractéristique, lesquelles permettent de remonter à l'objet émetteur, en produisant, le plus souvent, la sensation qui correspond à l'objet, ou, sinon, en rendant simplement manifeste son existence hors de nous. Car, sans une certaine sympathie issue de l'objet et renvoyant à lui, une telle sensation représentative ne pourrait avoir lieu. Il ne faut donc pas croire que l'air lui-même soit façonné par la voix émise ou par les émissions du même genre, car, s'il est ainsi affecté par elle, il s'en faudra de beaucoup que ce soit suffisant ; mais, quand nous émettons la voix, aussitôt que le choc se produit en nous, il provoque l'expulsion de certaines particules, lesquelles forment un courant analogue à un vent, expulsion qui nous procure l'affection auditive.
Et, il faut également admettre que, comme c'est le cas pour l'ouïe, l'odeur ne produirait aucune affection si n'étaient emportées loin de l'objet certaines particules, propres par leur taille à mouvoir l'organe de l'odorat, les unes de manière à le troubler et le contrarier, les autres sans le troubler et en lui convenant.
Et il faut encore penser que les atomes ne retiennent aucune qualité des phénomènes, en dehors de la forme,du poids, de la grandeur et de tout ce qui est nécessairement lié à la forme. Car toute qualité change ; mais les atomes ne changent en rien, puisqu'il faut que quelque chose reste dans la dissolution des composés, de solide et d'indissoluble, qui produira des changements non pas allant vers le non-être, mais par déplacement dans beaucoup de corps, également par apport et retrait de certains atomes. D'où suit avec nécessité que les éléments qui se déplacent sont indestructibles, et n'ont pas la nature de ce qui change, mais des parties et des formes propres : car ces choses-là aussi nécessairement restent. Et en effet, dans les choses de notre expérience qui changent de forme par retranchement < de matière > tout autour, la forme est saisie comme leur restant inhérente, tandis que les qualités ne demeurent pas dans ce qui change comme la forme reste, mais elles disparaissent du corps tout entier. Ces éléments qui restent sont donc suffisants pour produire les différences des composés, puisqu'il est nécessaire que quelque chose subsiste et ne périsse pas dans le non-être.
En outre, il ne faut pas croire non plus que toute grandeur se trouve dans les atomes, afin que les phénomènes n'infirment pas ; mais il faut admettre qu'il y a des différences de grandeur. Car, cela étant ajouté, il sera mieux rendu compte de ce qui regarde les affections et les sensations. Mais que s'y trouve toute grandeur n'est pas utile pour expliquer les différences des qualités, et il faudrait en même temps que des atomes arrivent à nous être visibles, ce qu'on ne voit pas se produire, et il n'est pas non plus possible de concevoir comment un atome deviendrait visible.
Outre cela, il ne faut pas croire que, dans un corps limité, il y ait des parties en nombre infini, ni n'importe quelle grandeur. Ainsi non seulement il faut rejeter la division à l'infini vers le plus petit, afin que nous ne fassions pas toutes choses faibles, et que, dans nos conceptions des ensembles corporels, nous ne soyons pas forcés, en comprimant les étants, de les consumer dans le non-être, mais encore il ne faut pas croire que, dans les corps limiés, le passage d'une partie à l'autre puisse se produire à l'infini, ni vers le toujours plus petit. Si, en effet, l'on nous dit qu'en un corps se trouvent des parties en nombre infini ou de n'importe quelle grandeur, il n'est pas possible de penser comment. Car comment ce corps pourrait-il encore être limité quant à la grandeur ? Il est évident, en effet, que les parties en nombres infini sont d'une certaine taille, et que, quelle que soit leur taille, la grandeur sera infinie. D'autre part, ce qui est limité ayant une extrémité discernable, bien que non visible en soi, il n'est pas possible de ne pas penser ce qui la suit comme pareil, et ainsi, en allant successivement de proche en proche, d'arriver par la pensée, de cette manière, au fait que l'infini existe. Il faut considérer que le minimum sensible, ni n'est tel que ce qui admet le passage d'un point à un autre, ni n'en est entièrement dissemblable, mais bien qu'il a quelque chose de commun avec ce qui est parcourable, tout en ne présentant pas la distinction des parties. Mais quand, par la suite de la ressemblance résultant de cette communauté < de nature > , nous pensons distinctement quelque parties de lui, l'une en deçà, l'autre au-delà, il faut nécessairement que se présente à nous l'égal. Nous voyons ces parties l'une à la suite de l'autre, en commençant par la première, et non dans le même lieu, ni en contact mutuel par leurs parties, mais comme, du fait de leur caractère propre, mesurant les grandeurs, les plus nombreuses ce qui est plus grand, les moins nombreuses ce qui est plus petit.
Il faut penser que cette analogie vaut aussi pour le minimum dans l'atome. Car si, évidemmentt, celui-ci diffère par la petitesse de ce qui est vu dans la sensation, pourtant la même analogie s'applique. Nous avons déjà dit, en effet, que l'atome a une grandeur, selon cette analogie, repoussant seulement au loin quelque chose de petit. Et en outre, il faut regarder les minima sans parties comme les limites des longueurs, fournissant, à partir d'eux-même comme unité premières, la mesure pour les grandeurs plus grandes et plus petites, cela aux yeux de la raison qui voient les choses invisibles. Car la communauté < de nature > entre ces minima et ce qui n'admet pas le passage de partie à partie est suffisante pour nous conduire jusqu'ici ; mais un groupement à partir d'eux ayant le mouvement, il n'est pas possible qu'il se soit produit.
En outre : dans l'infini, il ne faut pas dire que le haut ou le bas sont le plus haut ou le plus bas. Nous savons certes, que l'au-dessus de la tête, à partir du point où nous nous tenons, pouvant se continuer à l'infini ( ou l'au-dessus d'un point pensé < pouvant se continuer > à l'infini ), le haut ne nous apparaîtra jamais être en même temps haut et bas par rapport au même < point > . Car cela est impossible à penser. Si bien qu'il est possible d'admettre un mouvement pensé à l'infini vers le haut et un vers le bas, même si ce qui est en mouvement d'auprès de nous vers les lieux au-dessus de notre tête, arrive d'innombrables fois aux pieds de ceux qui sont au-dessus de nous, ou ce qui est en mouvement de chez nous vers le bas, d'innombrables fois au-dessus de la tête de ceux qui sont au-dessous. Car le tout du mouvement est pensé néanmoins avec l'opposition de chacun à l'autre à l'infini.
Et encore : les atomes ont nécessairement une vitesse égale quand ils sont emportés à travers le vide, rien n'offrant de résistance. Car ni les lourds ne seront emportés plus vite que les petits et les légers, quand rien du moins ne vient au-devant d'eux, ni les petits que les grands, ayant tous un passage approprié, quand rien non plus ne fait obstacle ; ni, non plus, < ne sont plus rapides > , Le mouvement vers le haut ou celui de coté, qui résultent des chocs, ni le mouvement vers le bas résultant des poids propres. Car, aussi longtemps que l'atome conservera l'un ou l'autre, il ira d'un mouvement aussi rapide que la pensée, jusqu'à ce qu'il se heurte, ou par l'effet d'une action extérieure, ou par son poids propre, à l'impulsion de ce qui l'a frappé.
De plus, en ce qui concerne les corps composés, l'un sera dit plus rapide que l'autre, les atomes ayant des vitesses égales, par le fait que les atomes compris dans les agrégats se meuvent vers un seul lieu dans le minimum de temps continu, même s'ils ne se meuvent pas vers un seul lieu dans les temps perçus par la raison, mais ils se heurtent fréquemmment jusqu'à ce que la continuité du mouvement, tombe sous le sens. Car ce qui est ajouté par l'opinion au sujet de l'invisible à savoir que les temps perçus par la raison auront aussi la continuité du mouvement, n'est pas vrai pour ces corps-là : puisque aussi bien est vrai tout ce qui est vu, ou qui est saisi en une appréhension immédiate par la pensée.
Après cela, il faut considérer, en se référant aux sensations et aux affections ainsi aura-t-on la confiance la mieux fondée que l'âme est un corps formé de fines particules, disséminé à travers tout l'agrégat, très semblable à un souffle comportant un certain mélange de chaleur, et en partie semblables à celui-ci, en partie à celui-là ; mais qu'il y a une partie qui, par la subtilité de ses particules, l'emporte de beaucoup sur ces éléments mêmes, et, pour cela, est davantage en connexion avec le reste de l'agrégat. Tout cela, les facultés de l'âme le rendent manifeste, ainsi que les affections, l'aisance des mouvements < de l'esprit >: , les pensées, et tout ce dont, étant privés, nous mourons. En outre, il faut tenir pour certain que la cause principale de la sensibilité réside dans l'âme ; et certes, elle ne la détiendrait pas si elle n'était en quelque sorte abritée par le reste de l'agrégat. Mais le reste de l'agrégat lui ayant permis, à elle, d'exerceer cette causalité, reçoit lui aussi d'elle sa part d'un tel accident, non cependant de tout ce qu'elle possède. C'est pourquoi, l'âme en ayant été séparée, il n'a plus la sensibilité. Car il ne possédait pas lui-même en lui cette faculté, mais il la procurait à une autre réalité née en même temps que lui, qui, grâce à la puissance constituée autour d'elle, par son mouvement accomplissant aussitôt pour elle-même l'accident sensible, le transmettait à lui aussi grâce à leur voisinage et à leur accord, comme j'ai dit. C'est pourquoi aussi, l'âme continuant à être dans le corps, même si quelque autre partie de l'agrégat a été enlevée, il n'y a jamais absence de sensation ; mais si elle meurt en tel endroit, ce qui l'abrite étant détruit en entier ou en partie, si toutefois elle reste, elle sauve la sensibilité. Au contraire, le reste de l'agrégat demeurant, en entier ou en partie, n'a pas la sensibilité, si s'en est allé ce nombre, si petit soit-il, des atomes qui concourent à former la nature de l'âme. Ainsi, quand l'agrégat se défait tout entier, l'âme se disperse, et elle n'a plus les mêmes facultés, ni n'a de mouvements, de sorte qu'elle ne possède plus de sensibilité. Car il n'est pas possible de la concevoir sentant si elle n'est pas dans cette association et n'est pas douée de ces mouvements, quand ce qui l'abrite et l'enveloppe n'est pas tel que, y étant maintenant, elle a ces mouvements. Mais voici encore un point qu'il faut remarquer : que nous parlons " d'incorporel ", suivant l'usage le plus fréquent du terme, à propos de ce qui peut être pensé par soi. Or il n'est pas possible de penser par soi l'incorporel, sauf le vide. Or le vide ne peut ni agir ni subir, mais fournit seulement à travers lui le mouvement aux corps. De sorte que ceux qui disent que l'âme est un incorporel parlent pour ne rien dire. Car, si elle était telle, elle ne pourrait en rien agir ni subir, mais en réalité, en ce qui concerne l'âme, les accidents font saisir l'un et l'autre avec évidence. Tous ces raisonnements au sujet de l'âme, en les rapportant aux affections et aux sensations, et en se rappelant ce qui a été dit au début, on verra qu'ils sont contenus dans ces schémas d'une manière suffisante pour qu'à partir d'eux, ils puissent être précisés d'une façon sûre dans le détail.
Et en outre : les formes, les couleurs, les grandeurs, les poids, et toutes les autres choses qui sont dites d'un corps, comme propriétés ( inséparables ) soit de tous, soit des corps visibles et connaissables par la sensation de ces propriétés, il ne faut les considérer ni comme des natures existant par elles-mêmes car on ne peut concevoir cela , ni comme n'étant pas du tout, ni comme des sortes d'entités autres, des incorporels, s'ajoutant au corps, ni comme des parties de celui-ci, mais il faut regarder le corps entier dans son ensemble comme ayant, grâce à toutes ces propriétés, sa nature propre et permanente, sans possibilité d'ailleurs qu'il en soit l'assemblage ( comme lorsque par l'agrégation des parties elles-mêmes un composé plus grand est formé, soit à partir des constituants premiers, soit à partir de grandeurs plus petites que ce tout quel qu'il soit ), mais seulement, dis-je, ayant, à partir de toutes ces propriétés, sa nature propre et permanente. Et toutes ces propriétés ont leurs modes d'appréhension et de discrimination propres, l'ensemble concret, de son côté, les accompagnant et n'en étant jamais séparé, mais recevant sa prédication d'après la notion d'ensemble du corps.
Et encore : bien des accidents arrivent souvent aux corps, sans les accompagner en permanence, qui ni n'ont leur place parmi les invisibles ni ne sont des incoporels. De sorte que, en nous servant de ce mot dans son acceptation la plus commune, nous rendons clair que les accidents ni n'ont la nature du tout que, l'ayant pris dans son ensemble, nous appelons corps, ni celles des propriétés qui l'accompagnent en permanence, sans lesquelles il n'est possible de concevoir le corps. Chacun peut être nommé d'après certaines appréhensions immédiates, l'ensemble concret l'accompagnant, mais dans le temps précis où chacun est vu survenant, car les accidents n'accompagnent pas en permanence. Et il ne faut pas exclure de l'étant l'évidence des accidents parce qu'ils n'ont pas la nature du tout auquel ils surviennent et que nous appelons aussi corps, ni celle des propriétés qui l'accompagnent en permanence ; d'autres part, ils ne doivent pas non plus être pensés comme existant par eux-mêmes ( car cela n'est concevable ni pour eux, ni même pour les propriétés permanentes ), mais ce qui, précisément, apparaît il faut les penser tous comme des accidents < des corps > , et non comme des propriétés accompagnant en permanence, ni comme ayant par eux-mêmes le rang d'une nature, mais il faut les voir de la façon dont la sensation elle-même détermine leur caractère propre.
Et, en outre, il faut prêter une vive attention à ce qui suit. Car il ne faut pas examiner le temps comme les autres choses, toutes tant qu'elles sont, que nous examinons dans un substrat, les rapportant aux prénotions que nous apercevons en nous-mêmes, mais il faut prendre en compte l'évidence même selon laquelle nous parlons de temps "long" ou "court", l'exprimant d'une manière conforme < à cette évidence > . Et il ne faut pas prendre en échange d'autres termes comme meilleurs, mais se servir, à propos du temps, de ceux qui existent ; ni ne faut-il, à propos de lui, énoncer quelque chose d'autre comme ayant la même essence que ce qui lui est propre car c'est ce que font certains , mais seulement réfléchir surtout sur ce à quoi nous associons ce caractère propre et par quoi nous le mesurons. Car cela n'a pas besoin de démonstration mais de réflexion, que nous l'associons aux jours et aux nuits, et à leurs parties, comme aussi aux affections et aux non-affections, aux mouvements et aux repos, concevant, à propos de ces choses, un certain accident particulier, celui-là même auquel nous nous référons en nommant le "temps".
Après ce qui a été dit auparavant, il faut considérer que les mondes, et tout compsé limité du même genre que les choses que nous voyons tous les jours, sont nés de l'infini, tous s'étant formés, par détachement, à partir d'amas particuliers plus grands ou plus petits, et que tous sont, en sens inverse, sujets à dissolution, les uns plus vite, les autres plus lentement, les uns la subissant par le fait de telles choses, les autres par le fait de telles autres choses. En outre, il ne faut pas croire que les mondes aient nécessairement une seule forme ; mais les uns sont sphériques, les autres de formes ovale et d'autres ont d'autres formes non pas cependant toute forme. Il ne faut pas croire non plus qu'il y ait des vivants qui se sont détachés de l'infini. Car on ne saurait démontrer que dans tel monde, des germes tels que d'eux se forment les animaux, les plantes et tout le reste de ce qu'on voit, pourraient n'être pas contenus, et que dans tel autre, ils ne pourraient l'être. De même aussi, il faut penser qu'ils sont nourris de la même façon que sur la terre.
Il faut encore admettre que la nature a été instriute et contrainte par les choses mémes, recevant d'elles des leçons multiples et variées, et qu'ensuite le raisonnement, à ce qui a été transmis par elle, ajoute la précision et fait de nouvelles découvertes, plus vite dans certains domaines, plus lentement dans d'autres, et, dans certaines périodes et moments < avec des progrès plus grands > , dans d'autres moindres. D'où aussi : les noms ne sont pas nés au début par convention, mais les natures mêmes des hommes, subissant selon chaque peuple des affections particulières et recevant des images particulières, faisaient sortir d'une manière particulière l'air emis sous l'effet de chacune des affections et images, de sorte qu'enfin il y ait la différence entre les peuples suivant les lieux. Ensuite, en commun dans chaque peuple, les particularités du langage furent fixées, afin que les désignations soient, pour les hommes entre eux, moins incertaines et plus brièvement exprimées. Et, pour certaines choses qui n'étaient pas visibles en même temps < que les autres > , ceux qui en avaient la connaissance, en les introduisant, mirent en circulation certains noms, ayant été forcés d'exprimer les uns, mais ayant choisi les autres par le raisonnement, conformément à la raison principale de s'exprimer ainsi.
En outre, en ce qui concerne les phénomènes célestes, il ne faut pas croire que le mouvement, la conversion, l'éclipse, le lever et le coucher des astres, et les phénomènes anlogues à ceux-ci, se produisent, quelqu'un en ayant charge, et les ordonnant, ou les ayant ordonnés, et en même temps possédant l'entière béatitude avec l'immortalité ( car les occupations, les soucis, les colères et les faveurs ne s'accordent pas avec la béatitude, mais ces choses-là se produisent là où se trouve la faiblesse, la peur et le besoin des autres ) , ni non plus que, tout en n'étant que du feu ramassé en boule, des êtres possèdent la béatitude, et, prenant en charge ces mouvements, les dirigent selon leur volonté. Mais il faut préserver toute la majesté du divin dans toutes les façons de parler ayant rapport à de telles notions, afin qu'il n'en résulte pas des opinions contraires à la majesté du divin. Sinon cette contradiction mème produira dans les âmes le trouble le plus grand. C'est pourquoi il faut juger que cette "nécessité" et cette "révolution" s'accomplissent par suite de la façon dont la matière s'est trouvée prise, dès l'origine, en ces conglomérats, à la naissance du monde.
En outre, il faut penser que la tàche de la science de la nature est de préciser exactement la cause des phénomènes dominants, et que le bonheur dans la connaissance des choses d'en haut se trouve là, et dans ce fait de < savoir > quelles natures sont celles qu'on voit dans ces phénomènes célestes, et tout ce qui est apparenté en vue de l'exactitude requise pour cela. En outre, dans de tels cas, il n'y a pas d'explication multiple ni de possibilité qu'il en soit ainsi ou d'une autre manière; mais il n'y a absolument rien dans la nature immortelle et bienheureuse de ce qui provoque la division ou le désordre. Et il est possible de saisir par la pensée qu'il en est absolument ainsi. Au contraire, ce qui relève de la recherche au sujet du coucher, du lever, du solstice, de l'éclipse et de tous les phénomènes apparentés à ceux-ci, ne contribue plus en rien au bonheur que permet la connaissance : ceux qui savent ces choses mais ignorent quelles sont les natures et quelles sont les causes principales, ont les mêmes craintes que s'ils ne savaient pas de surcroît ces choses là, peut-être même de plus grandes puisque l'étonnement venu du surplus de connaissance de ces phénomènes ne peut prendre
fin par la saisie de l'ordonnance des faits fondamentaux. C'est pourquoi nous découvrons plusieurs causes des solstices, des couchers, des levers, des éclipses et des phénomènes du même genre, comme aussi dans les choses qui se produisent prises sous leurs aspects particuliers, et il ne faut pas croire que notre manière de traiter ces phénomènes n'a pas atteint l'exactitude telle qu'elle importe à notre tranquillité et à notre bonheur. De sorte que, examinant de combien de manières se produit près de nous le phénomène semblable, il faut en inférer les causes des phénomènes céleste et de tout l'invisible, méprisant ceux qui ne connaissent, à propos des phénomènes qui nous donnent une image venant de loin, ni ce qui est ou se produit d'une seule manière, ni ce qui arrive de plusieurs manières, et encore qui ignorent dans quel cas il n'est pas possible de rester sans trouble. Si donc nous pensons qu'un phénomène admet de se produire d'une certaine façon, et dans les conditions dans lesquelles il est également possible d'être sans trouble, sachant qu'il se produit de plusieurs façons, nous serons sans trouble comme si nous savions qu'il se produit d'une certaine façon. En plus de toutes ces remarques générales, il faut considérer ceci : que le trouble le plus grand pour les âmes des homme a son origine dans le fait d'opiner que ces corps sont bienheureux et impérissable et qu'ils ont en même temps des volontés, des actions et des causations contraires à ces qualités, et dans le fait d'attendre ou de soupçonner quelque peine terrible et éternelle, en conformité avec les mythes, ou encore en craignant l'insensibilité même qu'il y a dans l'être-mort comme étant quelque chose par rapport à nous, et dans le fait d'éprouver ces choses-là non à la suite d'opinions mais de quelque disposition d'esprit irrationelle, à cause de quoi, ne déterminant pas ce qui est à craindre,ils sont la proie d'un trouble égal à celui qu'il éprouverait s'ils avaient sur ces choses des opinions fermes, ou même plus grand. Mais l'ataraxie est d'être délivré de toutes ces craintes, et d'avoir la mémoire constante des doctrines générales et principales.
En conséquence, il faut être attentif aux affections présentes, et aux sensations, aux communes suivant ce qui est commun, aux particulières suivant ce qui est particulier, et à toute l'évidence présente suivant chacun des critères. Car si nous sommes attentifs à ces choses, ce de quoi le trouble et la crainte naissent, nous en déterminerons exactement la cause, et nous nous en délivrerons en expliquant les causes des phénomènes célestes et des autres qui surviennent sans cesse, tous tant qu'ils sont qui épouvantent à l'extrême les autres hommes.
Voilà, Hérodote, les éléments capitaux du système de la nature résumés pour toi. De sorte que ce discours, ayant été retenu avec exactitude, a la pouvoir de faire, je pense, que quelqu'un, même s'il ne va pas vers toutes les précisions de détail, acquière une force incomparable par rapport aux autres hommes. En effet, de lui-même il rendra claires nombres des choses que j'ai exposées exactement en détail dans la système entier, et ces choses-ci mêmes déposées dans la mémoire, l'aideront constamment. Car elles sont telles que même ceux qui sont déjà entré suffisamment ou même parfaitement dans la connaissance précise du particulier, en remontant à de telles vues d'ensemble, mènent à bien la plupart des études concernant la nature dans son ensemble. Ceux, d'autre part, qui ne sont pas complètement au nombre des disciples accomplis en savoir, à partir de cet abrégé-ci, et d'une manière qui ne recourt pas à l'enseignement oral, font, avec la promptitude de la pensée, la revue des doctrines les plus importantes pour atteindre la sérénité.
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